De l'autre côté : l'Albanie.
Ohrid
Forcément, impossible d'aller au lac d'Ohrid sans faire un tour par la ville du même nom, capitale touristique de la Macédoine. Du port de plaisance, très animé, en passant par ses rues commerçantes jusqu'aux pentes de la vieille ville, il y a beaucoup à découvrir à Ohrid : églises, forteresse, même un théâtre antique ! Le centre historique est un dédale de petites ruelles où il fait bon flâner et se perdre... même si vous finirez toujours par retomber sur vos pieds (les villes au bord de l'eau sont pratiques pour cela). J'y ai passé un après-midi et je n'ai fait qu'effleurer sa surface. Je ne peux prétendre à un guide exhaustif de la ville mais je peux vous parler des endroits que j'ai préférés.
L'histoire d'Ohrid remonte à l'Antiquité, à l'époque de Philippe II de Macédoine, alors que la ville s'appelait Lychnidos. Détruite par un tremblement de terre au VIe siècle, les rares vestiges qui témoignent de cette époque sont l'ancien théâtre antique, construit au Ier siècle puis oublié pendant plus d'un millénaire avant d'être redécouvert au XXe siècle (lieu de persécution des chrétiens, il fut enseveli par les habitants à la chute de l'Empire romain, ce qui explique son bon état). Il est bâti à flanc de colline, juste en dessous de l'imposante forteresse ; des représentations y sont données à présent. Le site est complètement ouvert et gratuit.
En sortant du théâtre, on tombe sur l'une des anciennes portes de la vieille ville, la porte haute, Gorna Porta.
La forteresse d'Ohrid, vue depuis le parvis de l'église Sainte-Marie-Peribleptos.
L'un des lieux les plus impressionnants d'Ohrid est sans nul doute la forteresse au sommet de la colline, surplombant toute la ville. Elle doit son nom au tsar bulgare Samuel Ier qui, au Xe siècle, fit d'Ohrid la capitale du premier empire de Bulgarie. Mais le premier édifice bâti à cet endroit remonterait à l'époque de Philippe II de Macédoine (IVe siècle av. J.-C.). La construction actuelle est un mélange de vestiges restaurés et de reconstruction. Ouverte de 9 h à 19 h, l'entrée coûte 60 denars ; la vue depuis le chemin de ronde est imprenable, que ce soit sur la ville ou le lac ! D'ailleurs à part ça, et quelques tours encore debout, il n'y a vraiment rien d'autre à voir et, comme d'habitude, zéro explication sur le lieu, son histoire...
Ohrid compte un grand nombre d'églises mais l'une des plus belles est sans aucun doute la cathédrale Sainte-Sophie. Construite sur une ancienne basilique chrétienne datant du Ve siècle, son aspect actuel date du XIe siècle. L'extérieur n'est pas le plus opulent mais tout se joue à l'intérieur, où des fresques datant du XIe siècle ont été découvertes durant les rénovations dans les années 1950 et 1960. Le programme est magnifique, avec plus d'une soixantaine de figures de papes, d'évêques, de prêtres... peintes. Quelques explications en anglais sont données à l'intérieur pour aider à décrypter qui elles représentent. L'entrée coûte 100 denars. Ne manquez pas de faire un tour à l'arrière du bâtiment, où l'on trouve un très beau narthex à deux étages.
Autre église qui vaut le coup pour la richesse de ses décors, c'est l'église Sainte-Marie-Peribleptos : la personne à l'entrée a eu la gentillesse de me faire une visite rapide du lieu et une description des fresques incroyables dont elle recèle : si celles de la cathédrale sont très anciennes, celles-ci frappent par leur richesse, reconnaissable notamment à une profusion de surfaces peintes en bleu, l'un des pigments les plus difficiles à produire, et la profusion des détails. Tous les murs de l'église sont recouverts de peinture, ce qui en fait un décor très chargé pas forcément évident à lire (merci les explications de mon guide improvisé !). La forme de l'église n'est pas bien visible de l'extérieur car une sorte de galerie couverte a été ajoutée plus tardivement ; les peintures aussi furent recouvertes à un certain point, d'où leur bon état de conservation (même si des restaurations ont été effectuées entre-temps) : d'ailleurs, c'est ce qui explique que des fenêtres aient été percées à des endroits incongrus. Moi qui ai été frustrée tout le long de mon voyage du manque de contexte sur les différents lieux visités, j'ai vraiment été ravie que l'on m'offre ces explications. L'entrée coûte également 100 denars. Depuis le parvis de l'église on a une vue imprenable sur la forteresse et la ville. Après tout, quoi de bien plus normal pour une église dont le nom signifie en grec "qui veille sur tout".
Sûrement le plus beau monastère de toute la ville, situé sur la colline de Plaochnik : le monastère Saint-Pantaleimon. L'extérieur est vraiment superbe, tout en petites colonnes, coins et recoins. L'intérieur (entrée gratuite) est par contre beaucoup plus sobre et, comparé à d'autres églises de la ville, décevant, disons-le : il faut dire que l'histoire de cette église a été des plus chaotiques. Construite au Xe siècle par Clément d'Ohrid, un disciple de Cyrille et Méthode, sur un site où aurait été enseigné pour la première fois l'alphabet cyrillique, elle fut transformée en mosquée au XVe siècle quand la région passa sous domination turque. Tombée en ruines au XVIIe siècle, elle ne fut reconstruite... qu'en 2002 (sur les fondations de l'église originelle et avec les méthodes d'époque) !
Avant l'édification du monastère, des églises existaient déjà sur cet emplacement et des mosaïques témoignent de la présence de ces basiliques chrétiennes.
Pour terminer, ce qui est certainement le bâtiment le plus connu d'Ohrid, la fameuse église Saint-Jean de Kaneo, bâtie sur son promontoire rocheux et faisant face à la mer. Certes, la petite église est très mignonne et le cadre est forcément très photogénique. Mais franchement, je ne comprends pas trop la hype autour de ce lieu : on peut admirer les fresques à l'intérieur pour 100 denars mais ce ne sont pas les plus incroyables de la ville (elles datent du XXe siècle ; celles de la coupole sont plus anciennes) ; par contre, c'est vrai, l'iconostase est particulièrement belle, même si datant de la même époque. Donc oui, certes, c'est un lieu à voir mais que je n'ai pas trouvé renversant pour autant !
Monastère de Saint-Naum
L'un des joyaux du lac d'Ohrid est sans nul doute le monastère de Saint-Naum, situé à quelques mètres, littéralement, de la frontière avec l'Albanie, à trente kilomètres au sud d'Ohrid. Il fut édifié par Naum, disciple de Cyrille et Méthode, au Xe siècle mais le bâtiment actuel, de style byzantin, est bien plus tardif. Même si l'église est moins impressionnante (par sa taille) que certaines d'Ohrid, le lieu est absolument enchanteur et la vue sur le lac, époustouflante. Malheureusement, comme beaucoup de monastères/églises en Macédoine, les photos en intérieur sont interdites : pas d'autres choix que de vous rendre sur place pour admirer les anciennes fresques !
Saint-Naum est également célèbre pour ses paons qui se baladent en liberté autour de l'église.
Si le monastère possède une atmosphère très apaisante (ou du moins c'était le cas à 9 h, avant l'arrivée des touristes en masse et notamment via les navettes fluviales au départ d'Ohrid : un conseil, vraiment, arrivez tôt si vous voulez profiter d'un peu de tranquillité), les choses sont bien différentes à l'extérieur : le parking est payant (sauf si vous arrivez suffisamment tôt, vers 9 h pour ma part, auquel cas personne n'est là pour vous réclamer quoi que ce soit à l'arrivée – je ne peux donc pas vous renseigner sur le prix dudit parking) et le chemin pour rejoindre le monastère est bordé de boutiques de souvenirs et de transats sur la plage. Bon en soi ce n'est pas gênant, c'est juste que pour un lieu de culte, ça dénote un peu.
Le parc comprend également plusieurs autres petites églises disséminées un peu partout ; ces fresques sont celles de Saint-Petka, à deux pas de l'entrée du monastère.
L'une des autres activités possibles sur place, c'est un petit tour en bateau pour remonter jusqu'aux sources du lac d'Ohrid, en fait des "infiltrations" d'eau (Internet me souffle que le nom scientifique correct est exsurgence) qui ont pour origine le lac de Prespa. Le tour dure un peu moins d'une demi-heure et coûte 200 denars. Les bateaux ne partent que s'il y a un nombre de passagers suffisant (donc autant dire que si vous êtes seul et que vous vous pointez à 9 h quand y a personne, bon courage – je l'ai vécu et j'ai bien cru que je ne pourrais pas faire ce fichu tour) mais il est possible de s'incruster avec un groupe, si bien sûr les autres passagers vous acceptent. Mon batelier a été plutôt avare en explications, c'est à peine s'il a montré les petits tourbillons d'eau qui formaient les fameuses sources ; mais bon, j'avoue que je m'en fichais un peu, ce qui m'intéressait c'était de profiter du paysage et à ce niveau on n'est pas déçu : la couleur de l'eau est incroyable, à certains endroits elle est d'une transparence que je n'avais jamais vue auparavant, la végétation est très luxuriante, aux mille et une teintes de vert. Et puis moi je ne dis jamais non à un tour en bateau !
Musée de la baie des os
Sur la route menant à Saint-Naum, un nom curieux attire l'attention : "Bay of Bones". Mais qu'est-ce donc ? Les Macédoniens auraient-ils l'humour macabre ? Il s'agit en fait d'une reconstitution d'un village lacustre préhistorique, basé sur les découvertes archéologiques effectuées sur un site un peu plus au nord, où de nombreux emplacements de pilotis ont été retrouvés (plusieurs milliers). L'accès à cette baie des os est payant (100 denars), la partie musée regroupe certains des objets collectés sur site (poteries, objets en silex...) mais les explications sont inexistantes. Quant à la reconstitution, elle comprend quelques maisons qui abritent peaux de bêtes et divers outils reconstruits (le site originel devait compter au moins vingt-quatre maisons). Malheureusement, là aussi les explications sont bien parcellaires (il y a un panneau informatif à l'entrée du parc qui retrace un peu l'histoire du site originel et c'est bien tout). Néanmoins, j'ai trouvé que le lieu, une vraie curiosité, dégageait un certain charme, cela permet aussi de "marcher" sur le lac et d'avoir des vues inédites des paysages alentour. Et puis 100 denars, franchement, ce n'est pas cher payé. Ici aussi, comme à la cité antique d'Heraclea Lyncestis, ce patrimoine mériterait d'être un peu mieux mis en avant. Et sinon, pourquoi ce nom de baie des os ? Tout simplement à cause du grand nombre d'objets en os taillés retrouvés sur le site originel.
Le site comprend également la reconstitution d'un camp romain (IIe siècle apr. J.-C.), ou du moins des fortifications qui l'entouraient. On peut y monter et on y jouit d'une très belle vue sur le lac et sur le village.
Parc national de Galichica
Sur la rive ouest d'Ohrid on trouve l'un des trois parcs nationaux du pays : Galichica (aussi orthographié Galitchitsa ou Galicica : ah les joies de la transcription des écritures cyrilliques !). Contrairement à Mavrovo où je m'étais rendue en quasi dilettante, j'avais cette fois bien préparé mon coup (bon, mieux en tout cas) : je voulais vraiment profiter de mon voyage en Macédoine pour faire une jolie rando, avec de belles vues à la clé, et pas simplement un petit circuit d'une ou deux heures dont j'ai l'habitude. Mais même si vous ne souhaitez pas randonner, emprunter la route jusqu'à son point le plus haut vaut vraiment le coup : le passage est certes payant (100 denars, trois fois rien) et la route parfois pas très bien entretenue (merci les bouts de bois et autres rochers en plein milieu) mais les paysages qu'ils offrent sont vraiment superbes. Il y a un point de vue (Koritski Rid), signalé par un panneau, qui permet un aperçu des lacets que fait la route ; et arrivé au niveau du col, on profite d'une très belle vue sur le lac d'Ohrid. Vraiment cela vaut le détour.
Et puis pour ceux qui décident de faire un peu de sport, il est possible de rejoindre le sommet du massif, le pic Magaro, qui culmine à 2 255 m. La randonnée (point de départ : col de Lipova) est très bien signalée : un petit parking attend sur le plateau et le parcours est ensuite balisé de marques blanche et rouge. La boucle fait en tout 8 km, il faut compter environ 2 h d'ascension (le dénivelé positif est d'environ 700 m) et un peu moins pour la descente. La première partie se fait en sous-bois, avant que l'on arrive en terrain dégagé (pour l'anecdote, n'ayant pas encore bien compris ce qui m'attendait et crachant déjà mes poumons après une heure de montée, quand j'ai vu la montagne j'ai pensé innocemment "non mais ça se trouve faut aller jusque là-haut" : je ne croyais pas si bien dire !). Au pied d'une sorte de cirque, on arrive à une bifurcation puis c'est reparti pour une nouvelle ascension jusqu'au sommet. Cette fois le sentier est à flanc de montagne et c'est parfois juste une piste, assez large pour une personne de front (si vous partez sur la droite ; en partant vers la gauche, vous allez rejoindre une sorte de chemin encaissé avec zéro visibilité). Au sommet, on est récompensé par une vue magnifique à la fois sur le lac d'Ohrid mais aussi sur le lac de Prespa, de l'autre côté du massif. Le chemin continue ensuite sur la crête jusqu'au pic Magaro où il ne reste plus qu'à redescendre.
Le lac de Prespa, au fond.
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Malgré le dénivelé, cette randonnée est vraiment accessible même sans expérience particulière (j'en suis la preuve) : elle est très bien balisée et il n'y a pas de passages très dangereux, juste une ou deux portions un peu plus délicates (derrière moi j'avais un groupe avec des enfants). Par contre, matériel minimum indispensable, notamment au niveau des chaussures. Déjà on est en montagne mais surtout le chemin est souvent très caillouteux, assez instable. Les pro de la rando se moqueront sûrement car la difficulté n'est objectivement pas très élevée mais j'ai été plutôt fière de relever ce petit défi, et avec des temps de réalisation tout à fait honorables. L'un de mes meilleurs souvenirs de ce séjour : mission réussie !
Sur les rives du lac
Sur la rive ouest, en dehors d'Ohrid, le pourtour du lac est surtout composé de petits villages qui vivent beaucoup de la pêche. Plus on s'éloigne des abords de la ville et ses grands complexes hôteliers, plus la nature regagne un peu du terrain : on trouve pas mal de plages, qu'elles soient "sauvages" ou bien aménagées avec transats, bar et tout le reste. Si vous venez en été et que vous avez un peu de temps devant vous pour la farniente, apportez votre maillot de bain : croyez-moi, ce sera dur de résister à ces eaux turquoise !
Où loger ?
Les logements ne manquent pas autour d'Ohrid, que ce soit dans la ville même ou bien dans les villages alentour. Région touristique oblige, les tarifs vont être un peu plus chers qu'ailleurs mais restent bien raisonnables par rapport à d'autres destinations, surtout en comparaison du cadre. C'est par choix que j'ai souhaité ne pas résider dans Ohrid même et j'ai ainsi loué une chambre dans une sorte de pension à un quart d'heure de voiture : la villa Chingo. Ce qui m'a décidé c'est surtout le balcon et la vue sur le lac : j'avais envie d'en prendre plein les yeux dès mon réveil et je n'ai pas été déçue ! Le reste de la chambre était très correct, avec le minimum nécessaire. J'avais également accès à une cuisine commune, pratique pour préparer le petit déjeuner par exemple. Le propriétaire était vraiment très sympathique et parlait bien anglais. Si ce n'est un WiFi un peu capricieux parfois, je recommande vraiment l'adresse... Mais mieux vaut avoir une voiture ! Coût des deux nuits : 54 €.
Prendre son petit déjeuner tous les matins face à cette vue...
Ainsi s'achève le récit de mon voyage en Macédoine, j'espère qu'il vous aura donné envie de découvrir ce pays ! Pour ma part, je ne sais pas si mes pas me porteront à nouveau là-bas dans le futur mais malgré un contexte plus dépaysant que d'habitude, je suis très heureuse de ce choix de voyage et j'en garderai longtemps des souvenirs émerveillés.
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