Si vous me suivez sur Instagram (sinon, qu'attendez-vous ? :)), vous avez pu voir que j'étais sur les bords du Léman il y a quelques jours. Cela faisait longtemps que je voulais aller à Yvoire. Depuis quasiment mon arrivée dans la région, il y a plus de quatre ans... C'est peu dire que j'ai pris mon temps ! Toutes les conditions étaient réunies dimanche dernier, alors qu'il s'annonçait une belle journée (la dernière de la saison ?), c'était donc le moment parfait pour y aller. D'autant que ce qui motivait ma visite, le jardin des cinq sens, n'était encore ouvert que quelques semaines avant sa fermeture annuelle... Concours de circonstances, les journées du patrimoine se tenaient ce week-end-là et j'ai ainsi pu profiter d'une visite guidée de la ville, très instructive, avec une guide passionnante. Ce fut l'occasion d'apprendre une foule de petites anecdotes et de faits historiques que je vais m'empresser de partager avec vous.
Pour commencer, un peu d'histoire. Le village, dans sa configuration actuelle, remonte au Moyen Âge et plus particulièrement au XIVe siècle. Avant ça, la région n'était pas désertée, loin de là : les premières traces d'occupation remontent au néolithique... Plus proche de nous, les Romains occupèrent les bords du Léman pendant de nombreux siècles. Du côté français, les terres étaient morcelées en parcellaires, de vastes propriétés octroyées à des personnes influentes, comme les hauts gradés militaires... C'est d'ailleurs ce découpage qui est à l'origine des communes. Puis, ce sont les Burgondes qui s'installèrent ici ; on a d'ailleurs retrouvé une nécropole tout près du village.
Faisons désormais un bon dans le temps : Yvoire devient un lieu doublement stratégique pendant les conquêtes de la maison de Savoie. Tout d'abord, c'est à cet endroit que la largeur du Léman est la plus étroite : un peu moins de six kilomètres séparent Yvoire de Nyon, en Suisse. Par ailleurs, la route qui circule entre Genève et Thonon-les-Bains passe par le bourg. Amédée V acquiert la ville au XIVe siècle et la transforme en place forte. Depuis cette époque, sa configuration n'a d'ailleurs que très peu bougé : on peut toujours admirer les deux portails d'entrée, la rue principale, le château sur les bords du lac...
En parlant du château d'ailleurs... Suite à un incendie en 1590, durant les guerres de Religion, son toit en bois fut complètement détruit... et ne fut reconstruit qu'en 1939 ! Pourtant, durant ces 350 ans, il ne fut jamais abandonné et la famille Bouvier, toujours propriétaire de la demeure, continua d'y habiter... et continue encore aujourd'hui. Propriété privée, il ne se visite malheureusement pas.
Levez les yeux : si vous apercevez une maison aux volets verts, c'est une maison de pêcheurs ! En effet, les barques sont de cette couleur et la peinture en sus n'est pas gâchée.
L'une des curiosités du bourg, c'est le clocher de son église. Celle-ci fut construite en deux temps, avec l'édification du clocher au XIXe siècle. Sa forme particulière, en bulbe, et surtout sa brillance sont très étonnantes dans un environnement médiéval. Mais toutes deux s'expliquent : la première, par les coutumes de l'époque, où l'on avait pour habitude de ramener de ses voyages en Europe des inspirations architecturales. Quant à la seconde, le matériau utilisé pour la rénovation dans les années 1980 – l'acier inoxydable – ne fait que rappeler celui d'origine – du fer poli – qui s'est oxydé avec le temps... Le sommet est quant à lui recouvert de feuilles d'or provenant de la dernière batterie d'or en France, située à côté à Excenevex.
Qui dit plus beau village de France, dit beaucoup de tourisme... et de quoi satisfaire lesdits touristes. Yvoire regorge donc de boutiques en tous genres, avec de nombreux artisans, mais également de restaurants. Attention toutefois, l'addition grimpe vite ! Pensant rester raisonnable, mon choix s'était porté sur une crêperie rue de l'église... Mais à 12 € la crêpe salée, comment dire... Ce n'est pas ce que j'appelle "bon marché" ! Heureusement le service était très rapide malgré une salle comble (moins d'une demi-heure montre en main), ce qui a rattrapé sur le caractère quelconque des crêpes.
Mais celle au caramel maison était plutôt bonne.
Comme je vous le disais plus haut, la principale raison de ma visite à Yvoire était son jardin des cinq sens. Ouvert en 1988, sa construction a entraîné l'une des modifications les plus marquantes de la topographie du village. Il se situe en effet sur les anciennes servitudes militaires qui s'étendaient au pied du château. Au Moyen Âge, cet espace était obligatoirement vide et constituait le dernier endroit où l'on pouvait se battre, en cas d'invasion. Des siècles plus tard, le terrain appartient toujours aux propriétaires de la forteresse mais son aspect a bien changé. Résultat d'une initiative privée, la visite est payante et permet de continuer à contribuer à l'embellissement du jardin. Au-delà des changements réguliers dans les espèces présentées et l'agencement des espaces, il est entretenu toute l'année par une équipe de quatre jardiniers.
Le jardin s'inspire de ceux médiévaux, qui nous sont parvenus par les textes et les gravures d'époque. Son organisation et ses nombreuses palissades et haies qui délimitent chaque espace en sont une des caractéristiques. Deux conceptions coexistaient : l'hortus conclusus, avec ses plantes "utiles" (médicinales, potagères), agencé en massifs formant une croix, souvent avec une fontaine au centre ; et l'hortus delicarium, à l'ordre moins strict, fait pour rappeler le jardin d'Eden et ainsi plus propice à la flânerie. Le jardin des cinq sens combine ces deux visions du jardin médiéval : découpé en plusieurs espaces, séparés par un total d'un kilomètre de haies, chaque lieu à sa propre fonction. La visite débute avec des espaces aux thématiques larges : plantes alpines, de sous-bois ou bien médicinales. Puis on entre dans le labyrinthe (pas de panique, celui-ci n'est pas fait pour perdre le visiteur !) qui dessert les jardins liés aux sens.
Touché, odorat, goût, vue et ouïe... chaque espace est interactif et nécessite que l'on se prête au jeu... Avec plus ou moins d'implication ! Si le jardin du goût vous demandera de le croire sur parole quant aux espèces comestibles présentées, pour le reste vos sens sont mis à contribution. On regarde, évidemment, on entend, bien sûr, mais l'on s'approchera des fleurs pour en sortir l'odeur, on frottera les feuillages pour en découvrir les parfums étonnants (miel, coca-cola, poivre...), on se baissera pour toucher feuilles veloutées ou au contraire les herbes piquantes. C'est vraiment une expérience singulière qui est proposée, à la fois ludique et instructive. Pendant une heure, on retombe en enfance, à s'émerveiller de l'ingéniosité et des richesses de la nature.
Rue du Lac
74140 Yvoire
Ouvert de mi-avril à mi-octobre - visite guidée possible - Entrée : 12 €
Histoire de profiter de ma journée au maximum, j'avais noté deux autres visites à effectuer. La première, c'est une exposition sur les vêtements du Moyen Âge, et plus particulièrement à la cour de Savoie, qui se déroule au domaine de la Châtaignière, juste à la sortie d'Yvoire, sur la route d'Excenevex. Plutôt courte, elle n'en est pas moins très intéressante. Je n'ai pas pris de photo car malheureusement elle est très peu photogénique (peu de costumes d'époque, même des reconstitutions, exposés par exemple) mais elle vaut le coup en ce qu'elle s'appuie sur de nombreux textes et iconographies médiévaux. Ainsi, chaque vêtement, chaque accessoire, chaque métier présenté s'appuie sur des exemples concrets, sur des sources d'époque. Cette remise en contexte est le point fort de cette exposition qui fera la chasse à de nombreuses idées reçues sur la manière de se vêtir au Moyen Âge ! Pour ne rien gâcher, le domaine est sur les bords du Léman et la vue participe à l'attrait du lieu.
Domaine départemental d’art et de culture
Route d'Excenevex
74140 Yvoire
Dernier arrêt en fin de journée, la plage d'Excenevex. Une drôle de curiosité que cette plage de sable fin sur les bords du lac. En fermant les yeux, rien qu'avec le bruit du ressac, on pourrait se croire au bord de l'océan ! Cela manque un peu d'embruns mais hé, c'est mieux que rien et surtout, le lieu est magique, avec les montagnes qui se profilent à l'horizon. D'ailleurs, pour profiter au maximum de la perspective, n'hésitez pas à emprunter le chemin qui borde le lac, au départ du centre du village : quand on arrive en vue de la plage, c'est bien plus joli que depuis le parking ! Ce jour-là, il y avait beaucoup de vent, et les kitesurfeurs s'en donnaient à cœur joie. Assise sur un banc, le regard perdu à l'horizon, une petite parenthèse hors du temps parfaite pour clore en beauté cette escapade.
Après cette parenthèse savoyarde, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour la fin de mon séjour dans le Val d'Aoste !
C'est un village plein de charme que tu nous présentes là... Vraiment très joli et agréable...
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